encore une fois, un texte de ressenti.
Julien Salaud est né en 1977, vit et travaille à Orléans.
Julien Salaud est une découverte bouleversante.
Rien ne prédestine jamais à tomber amoureuse d’une œuvre. Depuis des années, j’errais dans une routine avec de vieux maîtres, un peu les mêmes - ce qui m’a fait me tourner vers la photo.
J’ai toujours aimé les vanités, surtout contemporaines. En rencontrer, en collectionner (en images) était une quête. Et c'est ainsi que j'ai rencontré les animaux empaillés de Julien Salaud. Ils m'ont parlé du temps qui passe, de la mort qui va et vient. J'ai vu l'artiste à l’œuvre, collant plumes et perles sur des têtes d’animaux « taxidermés » ; son regard bleu est aussi perçant que celui des fameux animaux sur lesquels il travaille. Son œuvre est précieuse comme un bijou.
A peine éclos, cerfs, oiseaux, renards… par essence nés proies, courent à leur perte. La vie transitoire est voilée sous les fils tissés autour des œuvres, fil d’Ariane, fil de l’araignée, fil de « Maman » (je pense à Louise Bourgeois, à la naissance, à l’accouchement, à la délivrance). Les installations participent de la construction, de l’idée de permanence tout en dénonçant la fragilité de la vie.
Difficile aussi de ne pas penser aux installations de Shiaru Chiota et ses cordelettes noires ou rouges, qui évoquent aussi bien les camps nazis que Hiroshima et Nagasaki ; ces artistes peuvent se revendiquer de Boltanski, Messager ou encore Jan Fabre. Guerre, mémoire, souvenirs.
Où est-on, sinon dans le labyrinthe du temps, dans un fil qui s’apparente à un petit pan de mur jaune ou une mélodie de Vinteuil, à des souvenirs déchirants qui renvoient à la guerre ou la disparition. L’étrangeté, la fragilité participent de l’éphémère tout en appelant la force, la résistance, face à l’opposant, le terroriste.
Julien est un amoureux de la nature, il ne prémédite pas son « message. » Il a abandonné des études scientifiques pour l’art ; mais ses années de science ne l’empêchent pas de donner à voir le sacré dans ses installations, dans un panthéisme certain, où, dixit Spinoza, rien ne peut exister ni être conçu en dehors de Dieu.
Qu’il ne soit pas à la Fiac cette année nous met face à la cécité des dirigeants, et renvoie aussi au Salon des Refusés.
Julien Salaud est représenté par la galerie Suzanne Tarasiève
http://2013.suzanne-tarasieve.com/artist/julien-salaud/?lang=fr