23 Septembre 2015
Jacques Monory est né en 1934 (ou 1924, selon sa fantaisie)
1964, repère : exposition « Mythologies quotidiennes » (musée d'art Moderne de la Ville de Paris) manifeste de la Figuration Narrative dont il va devenir une figure majeure.
La peinture de Jacques Monory, figure de proue de la Figuration narrative, s'inspire de scènes de la vie quotidienne et procède par séries. Revêtant volontairement l'aspect d'une image cinématographique, elle est essentiellement autobiographique : Monory projette une photo de ce (ceux) qu'il aime sur une toile, sans peindre la copie de la photo mais la représentation du sentiment qu'elle lui inspire.
Les notions cinématographiques de champ, de profondeur, de cadrage sont très importants dans ses toiles. Sa technique relève du montage : chaque tableau semble un plan-séquence du film de sa vie. Longtemps, l'image est restée un monochrome bleu, synonyme de lointain, de distance, de rêve. La mise en place de son vocabulaire plastique prend du temps et définitivement chair lorsqu'il commence à peindre un objet fétiche : le revolver. Les thèmes se mettent en place, , une certaine violence, la mort, les femmes ...
Le cinéma est une influence majeure dans son oeuvre : Howards Hawks, le technicolor, les films noirs des années 50 et surtout la Jetée de Chris Marker, appelé « photo-roman », une succession de photos réalisées au Pentax 24x36. Dans la Jetée comme chez Monory, les femmes ont une apparence plutôt nordique, des femmes qui "auraient le visage de neige et de solitude de Greta Garbo" (1). Les images ne sont qu'une projection de la réalité.
La Jetée, cet essai de science-fiction de 1963 marque Monory de manière très forte : la succession d'images fixes, de souvenirs enfouis d'un bonheur provisoire, menacés par l'idée de la mort imminente semble issue de son oeuvre. Le rêve serait sans doute d'atteindre à l'image fixe, qui possède un immense impact émotionnel.
On a le sentiment que la circulation du désir est lancinante, comme chez Proust, avec l'insaisissable Albertine, ou comme dans Le vice consul et Le ravissement de Lol V. Stein de Duras ; le désir reste inassouvi, exaspéré. L'amour est comme inatteignable.
N'est-ce pas ce que Monory a toujours voulu réaliser dans son travail, un film formé de plans fixes qui arrêteraient le temps, retardant ainsi l'approche de la mort ? La non-sentimentalité, ou le non romantisme si on ose dire, est mis en avant par les artistes. Mais tous deux ne veulent-ils pas suspendre l'imminence de la fin du monde ?
(1) Roland Barthes, Mythologies, 1957.
J'ai travaillé sur Monory à Paris I. C'est un type incroyable, qui m'a ouvert des horizons infinis entre 20 et 25 ans. En aucun cas il ne s'agit d'être exhaustif ou trop pointu. C'est un billet émotionnel, comme je le fais ici.
(1) Roland Barthes, Mythologies, 1957.
J'ai travaillé sur Monory à Paris I. C'est un type incroyable, qui m'a ouvert des horizons infinis entre 20 et 25 ans. En aucun cas il ne s'agit d'être exhaustif ou trop pointu. C'est un billet émotionnel, comme je le fais ici.
J. Monory, Meurtre n°2 1968, huile sur toile 228x195 cm, Musée de Grenoble// // C. Marker, La jetée